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Rubrique philo-poche, cours sur Philagora http://www.philagora.net/philo-poche/

 
Le devoir, notes de lecture.

   Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs.

"Le devoir est la nécessité d'accomplir une action par respect pour la loi." Fondements de la Métaphysique des mœurs, Première section.

J. Costilhes commente: "Cette définition est l'expression la plus précise qui ait été donné de la règle morale. On peut obéir, en effet, à une loi de deux façons, soit par respect pour la loi parce que c'est la loi, soit en vue d'un but déterminé qu'on veut atteindre."

I- La nécessité n'est pas celle d'un mécanisme, d'une loi subie, d'une passion, mais d'une représentation de la loi morale et d'un sentiment de respect que cette loi suscite chez un être raisonnable dont elle humilie la sensibilité.

II- Cette obéissance à la loi ne peut avoir tel ou tel contenu particulier pour mobile, tel ou tel intérêt sensible car cela réduirait l'action à un moyen de satisfaire un désir.

III- L'action morale, agir par devoir, exige que seule la forme de la loi morale soit le principe de l'action: 

"Je dois toujours agir de telle façon que je puisse vouloir aussi que ma maxime devienne une loi universelle." Fondements de la Métaphysique des mœurs, Première section.

- J'affirme l'humanité d'une action qui dépend uniquement et directement de la raison.

"La moralité n'est qu'une figure du respect pour la loi morale qui n'est rien d'autre que le mobile, exigence intérieure." Fondements de la Métaphysique des mœurs, Première section.

IV- Comprendre que la loi morale a un effet négatif et un effet positif:

  1. Négativement elle s'oppose aux penchants de la sensibilité et provoque un déchirement, une douleur. L'écart entre le loi morale universelle et les appétits sensibles particuliers a pour effet d'humilier l'homme et de blesser sa conscience de soi, sa dignité, en révélant ses faiblesses.

  2. Pourtant, positivement, la loi morale provoque le respect, ce qui affaiblit du même coup les penchants: en effet c'est l'occasion pour chacun, en agissant par devoir, d'acquérir un mérite et donc lui aussi de mériter le respect puisqu'il respecte la loi morale.

La loi morale, par sa pureté (elle est sans mélange de penchants) induit la possibilité pour une volonté de se gouverner elle-même, de réaliser l'humanité en sa propre personne:

"L'impératif pratique sera donc le suivant: Agis de telle sorte que tu traites l'humanité dans ta personne et dans celle d'autrui toujours en même temps comme une fin, jamais simplement comme un moyen." Fondements de la Métaphysique des mœurs, Deuxième section.

V- Personne, fin en soi, dignité, ne sont que les figures d'une liberté pratique morale, que Kant définit comme, "l'indépendance de la volonté à l'égard de toute autre loi que morale."

"La volonté n'est donc pas seulement soumise à la loi; elle y est encore soumise de telle façon qu'elle doit être regardée comme instituant elle-même la loi, et comme subordonnée à cette loi (dont elle peut se regarder elle-même comme l'auteur) pour cette unique raison." Fondements de la Métaphysique des mœurs, Deuxième section.

VI- En obéissant à une loi valable pour tous, l'homme n'est pas aliéné car il se soumet à sa propre législation: en obéissant à une loi universelle, il accède à l'autonomie, à la situation d'un être qui se donne à lui-même sa loi: il s'oblige à agir selon sa volonté législatrice universelle, pleinement humaine, et non selon sa volonté particulière.
Mais cette autonomie a un prix: l'humiliation de sa sensibilité, le sacrifice de ses appétits font que l'accomplissement de son devoir l'empêche d'être pleinement heureux. C'est un être déchiré qui ne peut que mériter le bonheur et postuler l'immortalité de l'âme et l'existence d'un Dieu intelligent et tout puissant seul capable de réconcilier  le concept et la nature, le devoir et la sensibilité: le souverain bien comme réalisation de la vertu et du bonheur en ce monde lui est interdit.

Pour approfondir, et pour élargir vers la pensée contemporaine, cet antagonisme, cette lutte au cœur de la conscience, se référer à Hegel, Introduction à la philosophie de l'histoire de Hegel de Jean Hyppolite, Seuil, page 31
"Je suis ce combat, je ne suis pas un des termes engagés dans ce conflit mais je suis les deux combattants et le combat lui-même, je suis le feu et l'eau qui entrent en contact et le contact est l'unité de ce qui absolument se fuit." 

Comprendre que la conscience ne peut qu'être malheureuse, déchirée entre l'absolu et sa finitude de conscience de la vie.

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